Cela s'est passé à Guivry le 18 Septembre 1896
Journal Le Guetteur de Saint-Quentin du 20 septembre 1896
« Guivry. Un empoisonnement.
Hier après-midi, à une heure, le parquet de Laon est venu présider à l’exhumation et à l’autopsie du cadavre de Mme veuve Godard, décédée le 25 avril dernier (en fait, le 20 avril) et inhumée le surlendemain.
Le 8 septembre courant, la gendarmerie, agissant sur l’ordre de M. le procureur de la République, avait procédé à l’arrestation d’un sieur Damhet, journalier, accusé d’avoir empoisonné la veuve Godard, sa belle-mère, et voici à la suite de quelles circonstances.
Il y a quelques semaines, une dénonciation était adressée au parquet contre deux jeunes gens, Aimé L…, habitant à la ferme de Lagache, et Gaston L… On les accusait de violation de domicile, parce qu’ils avaient pénétré chez une demoiselle Julia C…, âgée de 17 ans, avec laquelle, au su de tout le monde, Aimé L… entretenait des relations. Les deux jeunes gens, malgré la réputation douteuse de Julia C…, furent condamnés à 10 jours de prison.
Julia C… est la nièce de Damhet, dit Martin ; à tort ou à raison, on accusa dans la commune ledit Damhet d’avoir, dans le but d’amoindrir sa nièce, adressé une lettre anonyme au parquet pour dénoncer les jeunes gens. Une lettre anonyme en appelait une autre ; celle-ci fut adressée à la gendarmerie de Chauny. Elle disait que Damhet avait empoisonné sa belle-mère, la dame Godard, avec du vitriol. Elle donna lieu à une enquête sommaire, qui fut abandonnée, aucun témoignage n’étant venu corroborer la dénonciation. Une seconde lettre fut adressée au parquet ; enfin, une troisième lettre donnant, paraît-il, quelques indications, fut envoyée au procureur général, à Amiens.
Sur ces bases nouvelles une enquête fut définitivement ouverte ; on interrogea un jeune garçon de 14 à 15 ans, nommé Leblond, dont la mère avait soigné la veuve Godard, et la dame Leblond. L’enfant déclara qu’il avait vu la veuve Godard boire du bouillon de couleur verte et dénonça formellement Damhet. Comme Damhet prétendait qu’il n’avait pas pénétré depuis une dizaine de jours au domicile de sa belle-mère, la dame Leblond lui démontra le contraire.
Au cours de l’enquête on apprit que la veuve Godard possédait un petit pécule qui pouvait atteindre une douzaine de cents francs et que Damhet craignait de voir cette aubaine passer dans d’autres mains. Ca aurait été pour éviter cette déconvenue qu’il avait résolu d’empoisonner sa belle-mère, dont la fin ne fut guère abrégée. La pauvre femme était condamnée par le médecin et sa mort pouvait, paraît-il, très naturellement survenir dans les deux ou trois jours.
A 4 heures 45, le parquet s’en retournait, emportant une caisse contenant les entrailles de la morte, dit la Défense. »
« On prétend dans le village que Damhet se serait contredit durant l’enquête judiciaire et que sa culpabilité serait certaine ; elle le serait s’il était démontré que la veuve Godard a absorbé à plusieurs reprises du bouillon, de la tisane et du vin assaisonnés de vitriol, tous ces breuvages de couleur verdatre dont parle le jeune Leblond ; mais il faut attendre les résultats de l’autopsie pour être fixé sur la valeur des propos tenus à Guivry. »
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